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Marc Large auteur dessinateur écrivain réalisateur
5 novembre 2008

Prochain livre

Renaud71

Préface de Christian Laborde

Dans le bus, durant la tournée Rouge sang, Renaud me disait qu’il aimait la façon dont Marc Large le croque. Moi aussi, j’aime voir la gueule de l’auteur d’Elsa émerger du papier blanc que Marc Large pose devant lui, puis scrute en tirant sur sa clope maigre avant de laisser sa main faire le boulot. Marc est un homme de main. Esquisser, dessiner, c’est confier à sa main ce que l’on a sous la tignasse, dans les tiroirs du rêve, derrière l’os du front.

Dans le bus, Renaud me parle de Marco, tandis que les musiciens regardent une video des Beatles. Faut les voir, les musicos à Renaud devant les Beatles : émerveillés, de parfaits mômes. Si Marco avait été avec nous, dans le bus, il les aurait dessinés en santiags et babygros, Titi and C°, la sucette dans la bouche. Et « la morve au nez » pour faire un clin d’œil à Renaud, au Sirop de la rue, chanson superbe.

Marco s’appelle Large. C’est un nom de marin, de voyageur, le nom d’un mec qui, avec ou sans voile, mais toujours muni d’un pinceau, prend le large. Et le large, le grand large, c’est ce qu’il nous offre quand il croque la ronde échine d’un ours, le pétale d’une jonquille aussi fin que le coton mercerisé de la culotte d’une meuf, ou les lichens qui, au Pays basque, se disputent la crête d’un rocher.

Mais ce qu’il aime tout particulièrement dessiner, le mec Marco, c’est la tronche de Renaud Séchan, chanteur né de l’accouplement, derrière la grange d’un renard et d’une fouine. Il peut prendre du poids, bouffer des pâtes, s’arrondir à mort, prendre les pire joues, il aura toujours le front d’un renard et le museau d’une fouine, Renaud. Le renard a une place de choix dans la littérature : c’est une star. Il serait temps de louer la fouine qui s’adapte à tous les terrains et fait son miel de tout ce qu’elle trouve. Comme Renaud qui va chercher les mots dans la rue, les parkings, les bistrots, et fout le bordel dans le poulailler social.

De Renaud Marco croque tout : le pull rayé, les poils de barbe, la clope, la fumée dans laquelle il se planque, les trottoirs qu’il longe, le Paris qu’il trimbale avec ses bals, ses bastons, ce Tout-Paname qui est le contraire du Tout-Paris. De Renaud il peint également la cravate, les santiags et, Dieu merci, laisse au vestiaire la veste rouge et pourave que Renaud enfila, un temps, avant d’entrer sur scène. Il saisit aussi, avec son crayon sans laisse, la gueule des maîtres et des potes de Renaud : Brassens, Coluche, Bruce Springsteen. Il y a même Tonton que Renaud persiste à prendre pour un type de gauche. C’est un naïf Renaud. Mais cette naïveté, qu’il partage avec l’eau, lui a permis d’écrire la merveilleuse chanson Baltique. De Tonton ne restera sans doute que ce blues à museau…

Les dessins de Marco se glissent ici entre les paragraphes de Nicolas Traparic. Traparic, Traparic : il est un peu louche, ce patronyme, un peu pas français. Monsieur Boutefeux, c’est sûr, l’a dans le collimateur. Il doit avoir une sacrée putain de fiche dans Edvige, le Traparic. Il me parle, ce nom couvert de sons de la tête aux pieds. On dirait celui d’un demi de mêlée. Traparic joue, mais avec les mots, les sons et, ce faisant, rejoint illico swingo le territoire sans frontières de l’enfance. Pas étonnant qu’il aime Renaud car, Renaud, c’est « le sirop de la rue », l’enfance dans la main, et le poing dans la gueule, Doisneau et Gavroche. Il sait lancer des pavés dans la vitrine des Versaillais. Il a une sacrée caboche, le braillard de la porte d’Orléans. Mais c’est lorsqu’il chante la Sorgue, lorsqu’il regarde les Pyrénées, lorsqu’il écoute une chanson de Dylan qu’il est le plus un « gamin de Paris ».

Christian Laborde

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